mercredi, décembre 28, 2005

Le 23 avril St-Jacques de Compostelle. Le pain quotidien

Monte Del Cozo- Compostelle
4km

C'est sous un ciel sans nuage que je fais mon entrée à Compostelle. Après avoir traversé le cœur de la ville de Santiago, j'arrive à la cathédrale.


J'entre par la « porte du pardon », une porte située à l'est qui n'est ouverte que pour les années saintes. Près de l'entrée principale, il y a une colonne qui est inclinée de plusieurs degrés. Cette inclination provient d'un rituel qui veut que les personnes mettent la main sur la colonne et fassent un vœux. Au cours des siècles, les millions de petites poussées données ont incliné la colonne de plusieurs degrés et ont également sculpté la forme d'une main dans la pierre.

À 11 heures 30, je m'assois dans la cathédrale. Il y a une messe avant celle de midi. Le prêtre récite le Notre-Père. Je l'entends toujours en Espagnol et je sais que j'en ai oublié une partie. J'essaie de me souvenir des paroles, mais je n'y arrive pas, il me manque quelque chose. Je récite la prière dans ma tête : « Notre-Père qui est aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Pardonnez-nous nos péchés comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés, ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du mal. »

La messe des pèlerins débute, la cathédrale est remplie à pleine capacité, il y a environ 3000 personnes. Je regarde autour de moi pour voir si je peux pas reconnaître des pèlerins. J'en connais seulement deux, les deux copains Anglais avec lesquels je m'étais perdu à Astorga. L'un d'eux, celui qui fumait la pipe en attendant que son ami le rejoigne lors de la montée d'O Cebreiro, est ému.


À la fin de la messe, ils balancent un encensoir de 5 pieds par 5 pieds qui est accroché au plafond de la cathédrale. L'encensoir se balance de l'est vers l'ouest de la cathédrale, sur une distance de 300 pieds et elle monte de 30 pieds dans les airs en se balançant. C'est très impressionnant.

Après la cérémonie, je visite la ville tout l'après-midi. Il y a beaucoup de choses à voir : des musées, des restaurants, des magasins, rien ne manque.

Je retrouve deux Allemandes que j'ai vues plusieurs fois sur le camino. Mary et Sandra sont dans le début vingtaine. Elles sont pleines d'énergies et elles ont le cœur à la fête. Mary est une femme d'une sensibilité hors du commun, il y a comme de la lumière dans ses yeux. Elle a quelque chose d'unique qui se dégage de sa personnalité. Je suis impressionné de voir qu'une personne si jeune ait une si grande conscience d'elle-même et de sa foi.

Nous arrêtons près d'une fontaine pour nous reposer. Mary veut en savoir plus sur moi. Elle me demande si mon pèlerinage m'a permis de trouver ce que je recherchais. Je lui réponds que je n'ai pas trouvé ce que je recherchais parce que je ne cherchais rien. Pour moi, l'objectif n'est pas d'arriver à Compostelle pour y trouver un trésor. Il s'agit plutôt d'amasser chaque jour une pièce d'or afin que lorsque tu arrives à Compostelle, tu aies déjà amassé ton trésor.

Mary me demande si j'ai l'intention de changer quelques choses dans ma vie. Sur le moment, je ne sais pas quoi lui répondre, puis, avec le temps les mots me viennent. J'aimerais bien continuer à être l'homme que je suis présentement, de ne pas laisser la routine, l'argent et le travail me distraire de ce que je suis.

La nuit tombe. Les filles m'amènent sur la Plaza de la cathédrale. Elles se couchent par terre en plein milieu de la Plaza et elle retourne leur tête, de façon à mettre leurs yeux près du sol, ce qui leur permet d'avoir le maximum d'angle pour admirer la cathédrale. Elles m'invitent à faire de même. J'admire la liberté que leur donne leur jeunesse, je décide d'en faire autant. Je me couche et je regarde la cathédrale les yeux près du sol. Au sommet de la plus haute tour de la cathédrale, il y a une sculpture de Saint-Jacques qui regarde vers le bas. Cela nous donne l'impression qu'il nous regarde ! On trouve ça cool !

Nous nous se séparons et je retourne à l'auberge. Je me couche et je pense à la prière du Notre-Père. J'essaie de me rappeler la phrase que j'ai oubliée. Après plusieurs minutes de réflexion, elle me revient dans la tête. C’est : « donne-nous aujourd'hui, notre pain de ce jour. »

Bientôt, je serai de retour chez moi. J'espère continuer de trouver d'autres pièces d'or. J'espère encore plus de pouvoir les reconnaître lorsqu'il en aura devant moi. Je prierai mon Dieu en lui disant donne-moi aujourd'hui, mon pain de ce jour pour que je grandisse un peu plus chaque jour et que je devienne un meilleur homme.

Sur cette pensée, je ferme les yeux et tombe profondément endormi.


compostelle