vendredi, janvier 13, 2006

Le 7 avril Calzadilla. La Cigogne

Fromista- Calzadilla de la Cueza.
38 kilomètres

compostelle
Je pense à ma famille à tous les jours. J’ai un garçon de 6 ans, Félix et une fille de 9 ans, Camille. Je leur écris souvent des courriels. En voici des extraits :

Ola Félix !

J’ai beaucoup marché ces derniers jours, hier par exemple, j’ai marché 38 km, c’est plus facile, car je marche dans une plaine et il fait froid.

Tu sais quoi Félix ! il y a un oiseau très étrange qui m’a suivi pendant 5 kilomètres, c’était au bord d’un ruisseau, l’oiseau s’appelle une cigogne. C’est un oiseau très gros qui fait un nid gigantesque dans les arbres. Cet oiseau jouait à la cachette avec moi, j’ai essayé de le photographier quatre fois, à chaque fois que je sortais ma caméra, il se sauvait. Alors, comme j’avais raté mon coup trois fois, j’ai décidé de garder mon appareil ouvert. J’étais sûr que la cigogne ne se montrerait plus et, paf ! elle est sortie de nulle part et elle est passée à dix mètres de moi et je l’ai photographiée.

compostelle
Plus loin, il y avait des hirondelles qui s’amusaient à faire le tour de moi, puis les grenouilles ont chanté de belles chansons, il devait y avoir 30 grenouilles, parce qu’elles chantaient fort.

Je t’aime !

À Camille,

Bonjour mon cœur d’amour, j’espère que tu vas mieux, ton vieux père commence à être sérieusement en forme. Lorsque je serai de retour, nous ferons en famille, une marche dans la forêt, je suis sûr que tu vas aimer le grand air.

Hier, j’ai pris une route déserte de 18 kilomètres. Je pouvais voir eniron 6 km devant moi. Imagine, tu marches une heure, tu arrives en haut d’une petite colline pour constater que tu as encore un autre 6 km à marcher. Cela a été ainsi toute l'après-midi. À la fin, j’étais un peu tanné, mais je suis arrivé au village comme d’habitude.

Je t’aime !

compostelle

J’arrive à Carrion de los Cordes vers midi, il me reste encore 18 kilomètres à parcourir avant de rejoindre l’auberge de Cazadilla, je décide donc d’arrêter dîner. Je trouve une épicerie et demande un morceau de fromage pour me faire un sandwich. La fromagère sort du fond de son tiroir, un restant de fromage emballé dans du papier cellophane. Je l’achète et je pars à la recherche d'un endroit pour manger.

Je trouve un banc de parc sur lequel je prépare mon sandwich. À l’aide de mon canif, j’essaie de trancher le fromage, mais il est dur comme de la roche et j’en suis incapable. Il ne sent rien, on dirait une pierre à savon. Je retourne donc à l’épicerie afin de l’échanger pour un autre. La fromagère est catégorique : pas de remboursement. Je cogne le fromage contre le comptoir, pour lui signifier qu’il est périmé et séché. Elle ne veut rien entendre et refuse de me rembourser. Ça ne faisait pourtant seulement 5 minutes que j'étais sorti de l'épicerie !

Après le dîner, dans une rue du centre-ville, une vielle femme qui ressemble à une sorcière me bloque le chemin. Elle ouvre sa bouche et pointe son doigt en direction de sa langue et de ses dents noires. Je lui donne un sac d’amandes que j’ai dans mon sac. Elle prend les amandes et me les remet. Elle veut de l’argent. Je regarde dans ma poche et je laisse tomber 3 euros dans son panier. En baissant les yeux, je remarque qu’elle a des souliers neufs et qu’elle est mieux habillée que la moyenne des gens. Je sens qu’il y a quelque chose d’étrange dans sa façon d’être et je décide de reprendre 2 euros. Mauvaise idée, elle se met en colère et commence à m'engueuler. Je pars et je lui dis d’aller se faire cuire un œuf ! Incroyablement, j’allais la revoir à Compostelle¨soit 400 km plus loin, en train de quêter au bord de la cathédrale. Aussitôt qu’elle m’a reconnu, elle a recommencé à me crier après. Elle devait dire quelque chose comme :¨ pourquoi as-tu repris de l’argent ? Pourquoi ? . C’était une quêteuse professionnelle.

En Espagne, il n’y a presque pas de clochard et de quêteux, parce qu’ils sont pris en charge par le gouvernement et l’Église. À vrai dire, c’est la seule quêteuse que j’ai rencontrée durant mon voyage.

Inutile de dire que Carrion de los cordes n’a pas été ma ville préférée !